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Dans une mine d’or, un mineur lave des pierres, Sénégal, 2011 © Laeila Adjovi
Entreprises et droits humains

Minerais issus de zone de conflit : les profits avant les droits humains

L'Europe vient de faire passer les profits devant les droits humains dans une négociation qui s’est terminée aujourd’hui sur le règlement européen sur le commerce des minerais issus de zones de conflit.

Au terme de plusieurs mois de négociations, l'UE est parvenue à un accord le 15 juin au soir, peu avant la fin de la Présidence néerlandaise qui portait le projet.

Mieux savoir ce que sont les minerais du sang : L’expression « minerais du sang » sert à décrire tous les minerais qui entretiennent des violations de droits humains. En savoir plus

L’idée de départ était de travailler à une législation qui s'assure que les minerais importés dans l'UE sont achetés de manière responsable et ne financent ni n'alimentent des conflits et des violations des droits humains.

Un texte qui ne changera rien

Cet accord est un pas dans la bonne direction, mais il risque au final de ne pas atteindre l'objectif fixé : la grande majorité des compagnies européennes important et commercialisant les minerais (ou les produits en contenant) n’est pas concernée par l’accord.

En acceptant de soustraire ces entreprises à la loi, l'UE mise sur l'espoir qu'elles choisiront de manière purement volontaire de se procurer des minerais de manière responsable. Cela a déjà été tenté, par la mise en place de normes non contraignantes. Mais celles-ci n'ont que des effets restreints : trop rares sont les entreprises qui prennent des mesures pour contrôler leurs chaînes d'approvisionnement en termes de conflit et de risques liés aux droits humains.

Ce texte impose donc à quelques entreprises seulement d’effectuer des contrôles basiques : les entreprises européennes qui importent des minerais bruts (mais pas les produits contentant ces minéraux – ordinateurs, portables, tablettes, etc).

Les investisseurs et les consommateurs européens n'auront ainsi toujours pas la certitude que les entreprises avec lesquelles ils font affaire se comportent de manière responsable. Cette loi changera peu – trop peu – de choses.

L'Union Européenne inefficace pour réguler ce commerce

Les lois européennes étant désormais moins contraignantes que celles d'autres pays, l'UE devient le maillon faible de la chaîne d'approvisionnement en minerais. L'UE aurait dû aller bien plus loin pour tirer parti d'une occasion unique de faire vraiment changer les choses.

Signez notre extraordinaire pétition

Les populations dans les zones de conflit ou à haut risque ne bénéficieront donc toujours pas de leurs richesses en ressources et ne seront libérées des violences liées au commerce des minerais du conflit.

Les populations qui continuent de subir les conséquences du commerce irresponsable, ainsi que les organisations de la société civile dans le monde, tournent maintenant leur regard vers les gouvernements européens pour s'assurer que la loi tienne ses promesses, à savoir garantir que les entreprises européennes s'approvisionnent de manière responsable. t : les profits avant les droits humains

Maintenant que cet accord politique est signé, les trois institutions de l’UE poursuivent les négociations sur sa mise en œuvre technique. Ce processus devrait durer plusieurs mois.

Un mineur montre un diamant brut extrait de la région de Boda en République cen trafricaine, mai 2014

Un mineur montre un diamant brut extrait de la région de Boda en République cen trafricaine, mai 2014 © REUTERS/Emmanuel Braun

Les espoirs déçus des français

En France, un sondage CSA* publié en octobre 2015 avait montré que 83% des Français, soit quatre sur cinq, souhaitaient que la France défende une législation européenne contraignante pour mettre fin au commerce des minerais des conflits, le gouvernement a la très grande responsabilité d'agir pour que ce règlement soit amélioré.

L’Europe et en particulier la France n’a pas encore entendu la parole des citoyens. Cela sera peut-être le cas dans quelques années, lors de la révision de ce règlement.

*Sondage CSA réalisé du 13 au 15 octobre 2015 auprès de 994 personnes et commandé par l’AITEC,